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Les "hippies" à la recherche d'adeptes... - Le
Monde - 21 novembre 1967
LES " HIPPIES " A LA RECHERCHE D'ADEPTES...
Vestes bariolées et pantalons élimés, djellabas, serre-tête dans les cheveux et colliers autour du cou, ils ont, le temps d'un été, transformé un quartier de San-Francisco en réserve indienne. Et, traînant dans le défoulement des vacances leur ennui de jeunes vieillards, ils se sont réfugiés derrière des mots : dormir, manger, s'aimer, fumer, rêver, pouvoir des fleurs et de la musique, parvenant néanmoins à créer une expression, le " psychédélique sound ", entendez par là ce qui provoque en vous un effort de compréhension élevé, une secousse intérieure...
Cadets bâtards des " beatniks ", ils ont vécu ce que vivent les fleurs déjà fanées.
Toujours à l'affût d'une nouvelle mode, d'un nouveau " gimmik ", le " show business ", à New-York comme à Londres, s'est emparé avec gourmandise du " hippy " et de la danse " psychédélique ". Celle - ci permet, aux dires de ses adeptes, un épanouissement de la personne dans des décors " op' art " que des projecteurs éclaboussent de lumière en flashes multicolores. La conséquence immédiate fut, à Londres, la destruction à coups de hache de quelques postes de télévision et de quelques voitures, mais aussi l'éclosion d'un chef-d'œuvre enregistré par les Beatles, toujours prêts à sublimer un son, une mode, un rien.
A Paris, vendredi et samedi, ils étaient mille cinq cents au Palais des Sports (six mille places), certains déguisés en trappeurs, d'autres en tziganes, ou agitant mollement quelques clochettes, l'air hébété, attendant vainement qu'il se produise quelque chose sur une scène envahie par des groupes anglais ayant déjà fait leur temps : sur le coup de minuit, peut-être, lorsque l'éclairage transformait en homme de Cros-Magnon un musicien installé devant sa batterie en tenue de bain...
Trois jours auparavant, huit cents phares de voitures, quatre cent cinquante projecteurs, 3,5 tonnes de ferraille, cinq canons lançant dix mille fleurs, cent cinquante bombes de confettis, une dizaine de bombes d'encens et, sur trois écrans, un bric-à-brac où Frankenstein côtoyait Dracula, Rita Hayworth en Salomé et Buster Keaton constituaient un spectacle superbement délitant à l'inverse de ce qu'a rassemblé le label " hippy " à Londres ou à Paris. Il est vrai que Johnny Hallyday et autour de lui une équipe solide de régisseurs et de musiciens étaient les maîtres de cérémonie.
Claude Fleouter
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