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Divan du Monde - 16 octobre 2007
 


     




Bientôt 20 heures ce mardi 16, ambiance détendue sur le trottoir devant le Divan du Monde. Quelques dizaines de personnes bavardent gentiment au gré de petits groupes d'où jaillissent parfois des exclamations étranges : Moon In June, Rock Bottom, Comicopera, Canterbury...

Soudain les conversations s'arrêtent et les regards se tournent vers un monsieur en fauteuil roulant suivi de quelques amis qui remontent rapidement la rue des Martyrs. A peine ont-ils pénétré dans la salle de concert que chacun reprend son bavardage, un léger sourire aux lèvres : il est bien là ce soir à Paris, et c'est tout simplement incroyable...

De la manière dont je me suis discrètement faufilé dans la salle je ne dirai rien si ce n'est un grand merci à ce musicien qui vient de jouer sur le dernier album de John Greaves dédié à la poésie de Paul Verlaine. A peine assis aurai-je le temps d'échanger quelques propos avec David Fenech sur son interview de R.W. pour la revue Chronic'Art (et dont il m'assura que la version intégrale sera bientôt en ligne) que Robert Wyatt et J.D. Beauvallet s'installent sur une estrade qui domine légèrement la salle maintenant comble.

De ce long dialogue seulement interrompu par la traduction puis de l'échange avec le public, que retenir ? les questions sont parfois convenues (Syd Barrett et le Pink Floyd, les claviers de Rock Bottom, les concerts qu'il ne fera plus...) mais R.W. se prête au jeu et répond avec humour, revenant comme à presque chaque interview sur la tournée américaine en première partie du Jimi Hendrix Experience ou sur les concerts de l'été 67 sur la Cote d'Azur qui firent connaître le Soft Machine en France. Il évoque son séjour de plusieurs mois à Paris durant son adolescence et son plaisir à y être retourné un peu plus tard pour y fréquenter assidument les caves de jazz du Quartier Latin. S'il ne s'exprime pas en français, il en comprend parfaitement les nuances et rectifie ou précise parfois la traduction s'il le juge utile...

Du studio d'enregistrement comme chambre de torture ? - "non, ce n'est pas une chambre de torture, plutôt une extension de ma propre tête" - à son rapport avec son voisinage à Louth (Lincolnshire) - "vos voisins savent-ils qui vous êtes ?" "Je ne peux pas, je ne dois pas me préoccuper de ces questions si je veux continuer à faire ce que je veux faire.. ce n'est pas mon problème..." , bien des sujets ont été abordés dans le plus parfait désordre, comme un puzzle dont on tournerait les pièces dans tous les sens avant de tenter de les faire s'emboîter: le plaisir de chanter en espagnol, l'engagement politique et la recherche du divin dans la musique soufie, la voix de Brian Eno, Billie Holiday...

Comme un long poême en prose, questions et réponses tissent une séquence musicale où la voix de Wyatt si émouvante et si signifiante nous parle de piano et de trompette à jouer lentement, de chansons d'amour qu'il n'a pas encore écrites, des deux manières de composer - en ajoutant ou en retranchant de la matière sonore - et de sa barbe qu'il a récemment coupée (un tout petit peu) pour offrir aux oiseaux de son jardin quelques poils dont ils feront leur nid... (!). Ce qu'il écoute et ce qu'il n'écoute pas, les musiciens fabuleux avec lesquels il a joué sur ses derniers albums - Evan Parker, Gilad Atzmon, bien d'autres aussi - et surtout cette humilité tranquille et souriante : "je fais des disques pour remplir les trous de ma discothèque, pour pouvoir écouter la musique que je ne trouve pas ailleurs... et lorsque qu'ensuite je me passe un disque de Mingus, alors là... je me sens tout petit..."

Pourtant ce soir là c'était lui le plus grand, et tous ces yeux qui brillaient en l'écoutant nous parler des hirondelles et des aliens ne me diront pas le contraire.








     


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