Quand Hot Chip invite Robert Wyatt à réinterpréter ses chansons, celui-ci les passe magnifiquement au révélateur de la tristesse.

Et voilà que riment drôles d'idées et beaux projets. Qui aurait pu imaginer un jour le vieux barbu Robert Wyatt fricoter avec les nerds de Hot Chip ? En réalisant ce rêve, suite au remix de This Summer Night qu'ils lui avaient offert, les Londoniens jettent un regard nouveau sur leur superbe album Made in the Dark de l'an dernier, en réenregistrant trois de ses titres les plus lents, qui avaient alors pu être occultés par son visage le plus dance. Chantées avec le vieux barde, ces chansons réorchestrées prennent d'un coup une trentaine d'années de patine, comme fabriquées dans un noble bois récupéré d'une épave séculaire. Si, en vieux sage, Wyatt ne sort de l'ombre que sur le refrain de Made in the Dark, il s'empare goulûment du majestueux Whistle for Will de sa voix tremblotante et d'un doux sifflement. Des enregistrements bizarroïdes signés de Geese, deux producteurs amis de longue date de Hot Chip, viennent aussi hanter le calme en faux plat de We're Looking for a Lot of Love, qui devient une effrayante bouteille jetée dans la mer de la solitude.

Puis, sans Robert Wyatt mais simplement remixé par Geese, le sautillant One Pure Thought baisse les voiles pour naviguer dans une mer de violons et laisser se déchaîner une tempête de sentiments. En ralentissant, et surtout en désossant ses chansons de leurs apparats festifs à la manière de l'album solo sorti en toute confidentialité par son chanteur Alexis Taylor (Rubbed out), Hot Chip réussit à en livrer le visage poignant, intime, à travers le genre de collaboration que plus personne ne prend le temps d'imaginer. Un pari largement gagné qu'eux seuls pouvaient oser : un unplugged des années fluo, made with the dark. '

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