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The fiftieth anniversary of the release of Rock Bottom is drawing to a close (I'm writing this on 29 December 2024) and I received this jubilant text from Xavier Béal on Book Bottom, a book by Thomas Hylland Eriksen and Øivind Hånes, published in Norway this autumn.
It occurred to me that only one book (Philippe Gonin's Rock Bottom) had so far dealt exclusively with Robert Wyatt's masterpiece. This Book Bottom is therefore the second, but doubtless not the last, so many possible entries and poetic revelations are to be found in the opus published in July 1974...
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Robert Wyatt Book Bottom,
The story of Robert Wyatt’s Rock Bottom Haerverk Forlag 2024
L’année 2024 a bien failli se terminer sans qu’un véritable hommage soit fait du
cinquantenaire de l’album solo Rock Bottom de Robert Wyatt paru chez Virgin Records le 26 juillet 1974.
Pourtant, venu de Norvège, un très joli livre blanc grège de 112 pages, fait à quatre mains
(Thomas Hylland Eriksen et Oivind Hanes), paru tout d’abord en norvégien, ensuite en
anglais fait le tour de la question (le précédent ouvrage important était celui de Philippe
Gonin (68 pages) paru chez Discogonie/Densité en 2017 et curieusement inconnu de la
biblio des auteurs norvégiens).
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Cet album, consacré en 1974 par un prix de l’académie Charles Cros en France a été analysé
de nombreuses fois et l’histoire de cette « exploration des fonds marins de Robert bloqué à
jamais sur sa chaise » est archi connue, de son élaboration durant l’hiver 1972 (soit avant
le terrible accident de 1973 à Londres) en résidence à Venise avec l’offre de la Gem Riviera
(combo organ) par la muse Alifie car Robert était un peu mélancolique pas mal désœuvré
et tout à fait inoccupé après le naufrage de son précédent groupe Matching Mole, jusqu’à
la réalisation avec un producteur attentionné (Nick Mason) et des amis musiciens virtuoses
Hugh Hopper et Richard Sinclair, indispensables et attentifs, mélanges magnifiques d’ex
Soft Machine, Caravan et de cuivres qui tous, semblent perpétuer un tant soit peu la
flamme de Matching Mole mais sans s’y inscrire véritablement et en déclinant en solo
l’œuvre de l’ex batteur/chantant depuis les premiers albums de Soft Machine sous
influence mid tempo d’avant-garde de Coltrane, Mingus revendiqués par Wyatt, de
mélopées au bord de l’effondrement de Van Morrison revendiquées plutôt par Alfie avec
des textes hommages à double ou triple sens à la Lewis Carroll ou Alfred Jarry.
L’ouvrage des deux compères norvégiens est divisé en pas mal de chapitres qui font
avancer l’analyse en permettant de multiples ramifications, notamment l’univers de Robert
Wyatt à la fois rattaché de loin à la galaxie de Canterbury (Hatfield and the North), tout en
s’en détachant avec discernement, ou en piochant dans les marges du mouvement (Henry
Cow), et en poursuivant les correspondances entre les musiciens sus nommés avec les
invités de l’album : Laurie Allen aux drums, Gary Windo à la clarinette, Fred Frith viola et
Mongezi Feza à la trompette, ainsi que la relative importance de Virgin Records à l’époque,
même si le grand patron de ce label se moquait éperdument du côté musical de son affaire.
On passe rapidement à l’exercice de fond à savoir l’analyse morceau par morceau et par
ordre (face A face B) des six titres de l’album, sans oublier l’architecture de ceux-ci dans
l’ensemble puisque Rock Bottom est tout sauf un assemblage de chansons mises bout à
bout (on peut parler ici de multi-concept album), les auteurs de l’ouvrage ne négligeant
aucune piste, depuis l’influence des musiciens sud-africains auprès de Wyatt, jusqu’aux
apports de la poésie chantée/récitée, inclassifiable d’Ivor Cutler, les savoureux mélanges
des soupirs de Robert à Alfie, bien aimée et indispensable (qualifiée malicieusement à la
fois de garde-manger (larder) et de diner (mégère et amante !), partly fish, partly porpoise (marsoin ce qui est pas vraiment flatteur !).., et de sirène complice et mystérieuse (c’est un
peu mieux), sous-marine et enfantine, mi vierge, mi sorcière, pardonnant tout mais pas
oublieuse des excès de son gaillard de mari) qui avoue ses «petits péchés » en partant dans
les aigus emplis de claviers à la fin de Last Sraw sur un We’re not Alone terrassant.
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Le tout de cet ouvrage limpide et argumenté, foisonnant et creusé comme un sujet d’étude
très révérencieux, mais pas trop, un peu facétieux, mais plutôt rayonnant, gardant son
sérieux comme un vrai pataphysicien, réellement documenté, sans pour autant alourdir la
lecture, assemblant les différents musiciens et protagonistes de l’album intervenant
toujours doucement et discrètement aux bons moments de la lecture (comme pour une
belle mise en scène ouvragée et complice).
L’ouvrage se termine par la séquence amusante et amusée de l’achat de l’album par les 2
auteurs, curieusement pas lors de sa sortie (1979 pour l’un et un peu par hasard pour le
deuxième).
Un livre dont on sent à la fois la révérence, le respect et la déférence des deux
auteurs ainsi que la volonté affirmée d’un hommage amoureusement écrit venant de bien
loin (la Norvège c’est de l’autre côté du Danemark qui lui-même est un peu en dehors de
l’univers anglosaxon bien que ce soit la même Mer du Nord (entrée maritime importante
dans l’ouvrage) qui est un des liens qui fait communiquer tous ces pays entre eux avec
Robert Wyatt et son splendide rock bottom multi-sens au beau milieu.
Xavier Béal
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Robert Wyatt Rook Bottom,
Discogonie 2017
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Un opuscule de 84 pages
uniquement consacré à Rock Bottom. Paru en 2017 (réédition augmentée d'une vingtaine de pages en 2021) dans la Collection Discogonie (Ed. Densité) dédiée à "ces trous noirs qui opèrent trente-trois révolutions par minute", ce petit ouvrage pourrait n'être qu'une longue critique de plus de cet album au son "intemporel" comme l'écrivent si souvent les commentateurs...
Ce qui distingue cette énième tentative d'épuisement du sujet, c'est justement de tenter de mettre à jour les mécaniques et les méthodes qui ont produit ce chef d'oeuvre tout en conservant la part d'émerveillement qui submerge l'auditeur à chaque nouvelle écoute.
Philippe Gonin rappelle également avec justesse tout ce que Rock Bottom doit à Nick Mason et ce coup de chapeau n'est pas immérité !
Certes, bien des extraits d'interviews et nombre d'anecdotes citées sur la réalisation de l'album ne seront pas une révélation pour les amateurs de ce site mais l'ouvrage reste hautement recommandable pour quiconque cherche encore à percer le mystère de cette traversée solaire en eaux profondes... |
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